Le dogme et la loi islamique
Le dogme et la loi islamique
Croyance en un seule dieu
Croyance en L’islam apparaît comme une religion simple dans son un seul Dieu dogme et dans ses rites.
L’islam ne se présente pas comme une religion nouvelle mais comme le prolongement du judaïsme et du J christianisme ou plutôt comme la restauration du monothéisme pur d’Abraham (Ibrahim). Il s’élève, par ït exemple, contre le dogme chrétien de la trinité qui lui semble une atteinte inacceptable à l’unicité de Dieu tir (Coran, V, 17). Il emprunte aux religions antérieures : jeûne au judaïsme, prière au christianisme, pèlerinage à la religion de l’Arabie préislamique. Il fait sans J: cesse allusion à la Bible et à l’Évangile. Islam signifie soumission. C’est la soumission à Allah « qui « a créé les hommes pour qu’ils l’adorent ». Allah est qualifié de quatre-vingt-dix-neuf épithètes dont le plus employé est miséricordieux (ar rahman). Dieu est 18 assisté d’archanges (Jibril, Mikaïl, etc.) et d’anges.
L’un d’eux, Satan, fut chassé du paradis et commande depuis à une armée de démons, les djinns. Allah, dieu créateur et dieu juge, a chargé certains hommes, les prophètes (Adam, Noé, Abraham, Moïse, Jésus et Mohammed) de transmettre ses messages. Mohammed représente le « sceau » des prophètes, le dernier. Il faut croire à la résurrection et au jugement dernier qui sera précédé par un grand bouleversement au cours duquel apparaîtra le « Mahdi », le bien dirigé. L’enfer selon l’islam ressemble à celui de la Bible (Coran, XXXVII, 60-70), alors que le paradis est présenté comme une immense oasis où coulent le lait, le miel et le vin (Coran, XXXVII, 40-49, et LVI, 12-22). Telles sont les grandes lignes du dogme. La soumission à la volonté d’Allah a souvent conduit à la croyance en la prédestination, au « Mektoub » (« c’était écrit ») engendrant une sorte de résignation, de fatalisme. Certains versets du Coran (Coran, XVIII, 28-29) semblent pour-tant laisser à l’homme la responsabilité de ses actes et l’inciter à l’action et à la lutte contre le mal.
Une religion universelle et égalitaire
Religion sans Église, l’islam laisse le croyant seul face à Allah. Tous les croyants sont fondamentalement égaux au regard de Dieu. La fraternité des croyants et leur égalité devant Dieu sont les principes fondamentaux. L’imam n’est que le dirigeant de la prière collective ; il ne joue aucun rôle d’intermédiaire entre le croyant et Allah. Partant de là, Louis Massignon a pu définir l’Islam comme une « théocratie laïque et égalilaire ». Nous verrons que le shiisme a introduit des
intermédiaires entre les hommes et Dieu.Si la foi est la condition du salut, le croyant doit ce pendant se conformer à la Loi, qui comporte cinq fondamentales appelées les « piliers de
prescriptions l’islam » :
La profession de foi(Chahada)
« Il n’y a de divinité que Dieu et Mohammed est un messager de Dieu », formule qui marque l’adhésion à la communauté qui constitue le premier élément de la loi et que le croyant prononce aussi dans toutes les circonstances importantes de sa vie, en particulier à l’heure de sa mort. Elle revient souvent dans l’appel à la prière lancé par le muezzin au sommet du minaret. C’est l’affirmation nette du monothéisme.
La prière(salat) est le devoir le plus important
Acte de louange et d’adoration non de demande ou de supplication — elle montre la soumission et l’amour de l’homme envers son créateur. Elle consiste en un ensemble de gestes et de paroles établi une fois pour toutes, qui ne laisse aucune initiative au fidèle. Le croyant l’accomplit cinq fois par jour, après s’être purifié avec de l’eau ou du sable et s’être tourné en direction de La Mecque : à l’aube, à midi, au milieu de l’après-midi, après le coucher du soleil et au début de la nuit noire. Le vendredi, a lieu la prière en commun à la mosquée, conduite par l’imam qui, répétons-le, n’est qu’un meneur, nullement investi d’un sacerdoce. L’harmonie découlant de la coordination des attitudes pendant la prière est fort impressionnante pour l’observateur non musulman. Il existe aussi une prière personnelle qui est laissée à l’initiative du fidèle.
Le jeûne(sawm) du mois ramadan
C’est un exercice d’ascèse et de maîtrise de soi, marqué par la privation de nourriture et de boisson, de l’aube au coucher du soleil, et l’interdiction de fumer et d’avoir des rapports sexuels ; c’est aussi un exercice de piété et de recueillement, si bien que de nombreux sermons et des cours d’instruction religieuse ont lieu pendant ce mois. Au cours de la nuit du destin, la nuit du 26e au 27e jour de ramadan, Allah inscrit le sort de chacun pour la prochaine année. Avec le calendrier lunaire, le ramadan change de saison ce qui permet au croyant de connaître l’épreuve en toute saison et place les musulmans des différentes zones climatiques sur un même pied d’égalité.
L’aumône légale (zakat: purification)
Au début, l’aumône légale avait un caractère charitable. C’était la dîme prélevée sur les riches pour être répartie entre les pauvres. Elle devint par la suite un simple impôt.Il a pour but de rassembler tous les musulmans. Il a permis de conserver les usages préislamiques qui furent dépouillés de leur ancienne signification et rattachés au souvenir d’Abraham. Avec l’islam, les Arabes se disent descendants d’Ismaël, le fils d’Abraham et de son esclave égyptienne Hagar, tandis que les Hébreux descendent d’Isaac, fils de Sarah. Le sacrifice d’Ismaël aurait eu lieu près de La Mecque. Ismaël fut sauvé par Dieu et devint l’ancêtre des douze rois, chefs des tribus bédouines arabes. Abraham aurait construit la Kaaba et institué le pèlerinage.
On distingue deux pèlerinages : le petit (omra) qui peut avoir lieu à n’importe quel moment de l’année et le grand qui ne peut avoir lieu qu’au cours du douzième mois lunaire : dhul al hijjah. Il est interdit lors- ,qu’on se trouve sur le territoire sacré de La Mecque (haram) de porter un vêtement cousu et un couvre- chef, de se raser, de se parfumer, de contracter mariage, d’avoir des rapports sexuels, etc. Les pèle¬rins se rassemblent à une dizaine de kilomètres de La Mecque, sur le mont Arafa, où Adam, chassé du para¬dis, aurait obtenu son pardon de Dieu et retrouvé Eve. Les pèlerins marchent ensuite en direction de La Mecque, passent la nuit à Muzdalifa et font une halte à Mina, l’endroit où aurait eu lieu le sacrifice d’Abraham ; là on lapide Satan, puis, arrivé à La Mecque, on fait la visite de la Kaaba en effectuant sept fois le tour de l’édifice et en baisant (si on peut s’en approcher) la pierre noire qui aurait été rapportée par Abraham du paradis. Blanche à l’origine, elle a été noircie par le péché des hommes.
Le pèlerinage montre la cohésion de la communauté musulmane par-delà les races et les nationalités. L’islam prévoit que le pèlerinage ne sera accompli que dans la mesure des possibilités de chacun. Le pèlerin qui se pare du titre de hajj jouit ensuite d’une grande considération.
La guerre sainte
La « guerre sainte » (Jihad) que l’on a souvent présentée comme un sixième pilier n’est pas un devoir mais une obligation temporaire, lorsqu’il s’agit de défendre la communauté. Le bonheur est promis aux martyrs de la guerre sainte {Coran, III, 158), ce qui stimule naturellement l’ardeur des combattants pour la foi (rnujahidin). La guerre sainte fut souvent proclamée lorsque le territoire islamique se trouva agressé, par exemple à l’époque des Croisades ou lors des grandes conquêtes coloniales. En fait, le jihad est « l’effort sur le chemin de Dieu » pour défendre et fortifier le « monde de l’Islam ». Il s’agit surtout de se réformer intérieurement. La lutte contre les défauts est un « jihad majeur » alors que la lutte armée contre les ennemis de l’Islam n’est qu’un « jihad mineur ». « En comparaison de toute réforme des mœurs, dit Ghazali, le devoir de jihad, les armes à la main », est « un léger souffle de vent sur la mer agitée » (cité par L. Gardet dans Les hommes de l’Islam, p. 85). Il faut ajouter aux prescriptions islamiques certains interdits alimentai¬res (alcool, sang, chair du porc), l’interdiction des jeux de hasard, la prohibition du culte des idoles, et par extension, de la représentation de Dieu, du Prophète et des hommes en général, par des images.L’Islam crée un type d’homme original, soumis à la volonté de Dieu, volontiers patient et résigné, mais toujours fier d’appartenir à une communauté qui prône l’esprit de solidarité, d’entraide et de justice.
Les premiers successeurs du Prophète et la naissance des sectes
Les califes(bien dirigés(rachidun)
Le Prophète Mohammed mourut sans laisser d’héritier bien dirigés » mâle et il n’avait pas eu, d’autre part, le temps (rachidun) d’organiser un État solide. Sa disparition faillit renverser l’édifice politique et social qu’il avait entrepris. Au lendemain de sa mort, des rivalités graves surgissent : rivalités entre Médinois et Mecquois, rivalités entre les « gens de la famille » et les aristocrates qoraishites. Comme le Prophète n’avait pas désigné de successeur, on procéda à l’élection de son lieutenant : le calife.
Abu Bakr
- Le premier fut Abu Bakr (632-634), vieux compa¬gnon du Prophète, père d’Aïsha, son épouse préférée, homme pieux et bon. Il dut affronter une révolte de tribus bédouines, agitées par la multiplication des faux prophètes. Il parvint à ramener l’ordre par un mélange de force et de diplomatie. Il avait réalisé l’unité de la péninsule et la conquête démarrait lorsqu’il mourut.
Omar
- Le deuxième fut Omar ibn Khattab (634-644), qui a laissé le souvenir légendaire du modèle de calife. Lui aussi, vieux et fidèle disciple du Prophète, il fut le conducteur et l’organisateur de la conquête triomphale sur les Byzantins et les Perses, ce qui ne modifia en rien la simplicité de ses mœurs et la rudesse de son caractère. Avec lui commença à apparaître un embryon d’administration.
Othman
- Le troisième, Othman, était encore un vieux compagnon du Prophète, mais il appartenait à l’aristocratie qoraishite et il ne manqua pas de favoriser ses 22 proches parents. Il semblait que la classe dirigeante
mecquoise prenait sa revanche en occupant les principaux postes de direction de la communauté, tout en se livrant à une course à la richesse. Les Arabes obtinrent l’autorisation de posséder des terres hors d’Arabie, ce qui laissait entrevoir la création d’une classe de propriétaires dévouée au pouvoir. Ces faveurs et le fait qu’Othman disposait à sa guise du trésor public provoquèrent un mécontentement qui se cristallisa autour des membres de la famille du Prophète, en particulier Aïsha veuve et Ali, gendre du Prophète. Othman fut assassiné en 656. Sa mort fut un événement grave, car elle constituait la première rupture (fitna) de la communauté et hypothéquait l’avenir. Son successeur pourrait difficilement se rallier tous les musulmans.
Ali
- Or, celui-ci fut Ali, l’époux de Fatima, le père des Ali seuls descendants masculins du Prophète : Hasan et Hussein. Il apparut comme le complice des meurtriers alors que la famille d’Othman, le clan des Omayyades conduit par Mo’awiya ibn Abi Sufyan, gouverneur de Syrie, réclamait vengeance. Après avoir battu ceux qui s’étaient groupés autour d’Aïsha à la bataille du Chameau, Ali s’appuya sur l’Irak pour préparer la lutte contre Mo’awiya. Il le destitua de son poste de gouver-neur de Damas, ce qui déclencha les hostilités. La ren-contre eut lieu en 657 à Siffin, sur l’Euphrate. On se battit plusieurs jours jusqu’au moment où les parti¬sans de Mo’awiya, qui allaient fléchir, accrochèrent des feuillets du Coran à la pointe de leur lance et demandèrent l’arrêt de cette guerre fratricide en s’en remettant au jugement de Dieu, c’est-à-dire à des arbi-tres. Ali accepta l’arbitrage, ce qui provoqua le départ d’une partie de ses partisans, les kharijites (« ceux qui sortent »), lesquels estimaient qu’il était inadmissible de confier le jugement à des hommes. L’arbitrage d’A- droh (janvier 658) donna tort à Ali en vertu de ses responsabilités dans le meurtre d’Othman. Mo’awiya fut proclamé calife par ses troupes (658) tandis qu’Ali, maître de l’Irak, s’attacha d’abord à écraser les kharijites. L’un d’eux l’assassina à Kufa en janvier 661.Mo’awiya triomphait donc sans combattre, mais des schismes étaient nés dans la communauté.
Le kharijisme
Les kharijites (« les dissidents »), dont nous venons L’origine de parler, apparurent très vite comme les puritains des schismes de l’islam, adeptes d’une morale rigoriste, con- et des sectes damnant tout luxe. Pour eux, la foi n’a aucune valeur si elle n’est pas justifiée par les œuvres. Les califes doivent mener une vie privée et publique exemplaire, impeccable, si bien que, hostiles à toute idée dynastique, ils veulent que le califat soit confié par voie élective au meilleur musulman sans distinction de race et de tribu, « fût-il un esclave noir ». Mais, dès qu’il commet une faute, il cesse d’être légitime. Les kharijites se recrutèrent souvent en milieu populaire, en particulier chez les nouveaux convertis (mawali) de l’Empire omayyade. Ils se divisèrent sur le problème de la foi et de l’attitude à observer à l’égard des autres musulmans.
Les azraquites furent des extrémistes pratiquant le terrorisme. Ils n’admettaient pas la dissimulation légale et ils massacraient impitoyablement leurs adversaires.
Les najadat, moins durs vis-à-vis des attentistes, furent cependant des théoriciens de la prise du pouvoir par les armes.
Les sufrites condamnent le meurtre politique, ad¬mettent la dissimulation de la foi par prudence et rejettent les massacres d’enfants des Infidèles.
Les ibadites, tout en étant toujours intransigeants dans les domaines politique et moral, se montrent beaucoup plus souples dans les relations avec les autres musulmans : on interdit par exemple de les attaquer par surprise sans les avoir invités à se rallier.
Le shiisme (shia : parti)
À l’origine, les shiites sont les partisans d’Ali qui partisans de la n’admettent pas son éviction du califat par Mo’awiya. famille du Hs estiment que le califat doit être héréditaire et resprophete ter dans la famille du Prophète par son gendre Ali, ses petits-fils Hasan et Hussein et leurs descendants. Op¬posés aux Omayyades puis aux Abbassides, ils ne reconnaissent comme chefs de la communauté que les imams, êtres doués d’une nature exceptionnelle, infaillibles et impeccables, car ils ont reçu une parcelle de la lumière divine. Ce sont donc les médiateurs entre Dieu et les hommes. Ils considèrent que le Coran, fal¬sifié d’ailleurs par Othman qui a enlevé tout ce qui concernait Ali, est un livre ésotérique qui a besoin d’être élucidé par une exégèse savante dont il faut faire 24 profiter les fidèles, ensuite, par l’initiation.
Les shiites se séparèrent très vite au sujet de la succes¬sion des imams. La plupart des sectes de l’islam ont une origine shiite. Les principales sont :
L’imamisme ou duodecimanisme qui suit les descendants d’Hussein jusqu’au douzième lequel, Mohammed, disparut mystérieusement en 874. Considéré comme le mahdi, on attend son retour à la fin des temps quand il reviendra rétablir la vraie religion. Le croyant doit faire allégeance à l’imam caché, chef de la communauté. Le premier parlement iranien fut ouvert au début du XXe siècle « en présence de l’imam caché ». Quant au culte imamite, il se caractérise par de grandes fêtes commémoratives se rapportant à la vie des imams et par de grands pèlerinages à leurs tombeaux.
Le zaydisme ne diffère de l’orthodoxie que pour l’imam qui doit non seulement être un descendant du Prophète mais aussi avoir mérité le pouvoir par les armes, son courage et sa piété. Les zaydites créèrent des émirats au Tabaristan et au Yémen.
L’ismaïlisme représente le shiisme extrémiste. Partisans du septième imam, Ismaïl, ils se sont subdivisés ensuite en une multitude de sectes ; certaines d’entre elles apparaissant d’ailleurs comme très éloignées de l’islam. Dans leur doctrine très ésotérique, ils ont incorporé de nombreux éléments étrangers, en particulier néo-platoniciens. Ils créèrent des sociétés secrètes, envoyèrent des missionnaires prêcher la doctrine et initier les adeptes, pratiquèrent le terrorisme, etc. Les principaux groupes furent les Fatimides, les Qarmates, les Druzes, les Nizaris, les Noçairis ou Alaouites, etc. Enfin, l’Aga Khan actuel est considéré par ses fidèles comme un descendant d’Ismaïl.
Le sunnisme
Face au kharijisme et au shiisme se définit peu à peu le sunnisme ou orthodoxie de l’islam. Ce sont les partisans du Coran et surtout de la Sunna, la tradition du Prophète et de ses compagnons. Pour eux, Coran et Sunna sont les garants de l’unité contre toutes les menaces de dissensions qui peuvent surgir. À propos de la part à donner à l’innovation, ils se séparèrent plus tard en quatre écoles juridiques que nous verrons plus loin. Les sunnites acceptent la situation historique telle qu’elle s’impose. C’est ainsi qu’ils soutiennent les Abbassides après les Omayyades, etc.