Représentations bouddhiques en Chine et en Corée
Les premières images sculptées de divinités bouddhiques qui apparaissent en Chine, probablement en provenance du Gandhâra par le truchement des oasis de l’Asie centrale, dans les premiers siècles de notre ère, sont copiées sur les modèles importés. Il s’ensuit que les plus anciennes images du Bouddha réalisées en Chine (probablement vers le milieu du IVe siècle) sont fortement influencées par le style indo-grec. Les sculptures représentant les divinités du panthéon mahâyânique ornent tout d’abord les grottes, lesquelles sont creusées selon des modèles indiens. Elles sont rarement exécutées en pleine ronde-bosse, mais plutôt en haut-relief, pour être vues frontalement, et décorent les murs des chapelles et des grottes. Dès la première époque, les styles apparaissent différents selon les régions. Cependant, le style majeur, celui de l’époque des Wei, montre des images des personnages divins avec un large front, un nez à l’arête aiguë, une petite bouche souriante. Les plis du vêtement retombent largement en ondulations qui se superposent, recouvrant le socle de la statue, laissant seulement un ou deux pieds apparents (comme à Longmen). Les attitudes sont raides et hiératiques, pleines de majesté, les visages et les corps sont maigres, élancés. Les auréoles sont larges et en forme de feuilles pointues. Bien que la terre soit le matériau de prédilection des sculpteurs chinois jusqu’au VIe siècle, de petits bronzes du même style sont coulés en assez grand nombre. Ces derniers sont exportés, notamment en Corée, où ils sont copiés.
Au cours des siècles suivants, les images bouddhiques subissent une transformation radicale : de nouveaux modèles sont alors venus de l’Inde, présentant les caractéristiques des styles Gupta. Les débuts de la période des Tang voient donc se transformer les images des Bouddha qui se dénudent de plus en plus et ont tendance à prendre des formes plus pleines. Les vêtements des Bodhisattva commencent à se surcharger d’ornements (bijoux, diadèmes, bracelets, pendentifs, etc.). Les corps prennent une attitude plus souple, en Tribhanga, « triple flexion » chère à la plastique indienne, surtout dans les images des divinités debout. Les halos deviennent, comme dans l’art des Gupta, ronds, et sont décorés de motifs floraux. Cependant, les lignes générales demeurent encore raides et l’allure des Bouddha hiératique. Les visages s’humanisent néanmoins quelque peu et deviennent plus réalistes (sculptures du Tianlongshan). Les traditions chinoises et indiennes tentent de s’interpénétrer, au bénéfice toutefois des styles indiens. Des écoles locales se forment, les unes où seuls des artistes chinois travaillent, d’autres où il semble que viennent œuvrer des artistes indiens. Les cous des images des Bouddha s’ornent, comme en Inde, des « trois plis de beauté », et les décorations de lotus apparaissent de plus en plus nombreuses. Les robes, à peine esquissées, ne recouvrent plus le siège des divinités…
Vers la fin du VII siècle, les styles évoluent sensiblement et suivent plus franchement les canons chinois : les visages deviennent plus réalistes, la flexion du corps plus accusée. Les plis des vêtements sont arrangés avec ordre. Les visages sont maintenant pleins, avec des paupières lourdes ; les coiffures sont compliquées et les bijoux nombreux et détaillés. C’est toujours l’art de la décoration des grottes qui prédomine, la statuaire de petite taille étant plus rare, en bois ou en pierre.
C’est à l’époque des Tang que commence à apparaître la sculpture bouddhique en poterie, art qui atteindra son plein développement pendant la période suivante, celle des Song. Mais il semble qu’à partir de la fin du IX siècle l’art de la sculpture tombe quelque peu en défaveur au profit de la peinture. Les parois des grottes (Dunhuang) et les murs des monastères d’Asie centrale se couvrent de fresques admirables, alors que la peinture sur rouleaux se développe pleinement en Chine même. Les peintres de cour abordent tous les sujets bouddhiques, bien que leur préférence aille à des sujets moins austères, comme la représentation des Luohan ou des divinités mineures. Ces peintres suivent les tendances générales des arts de leur époque. Par la suite, l’art bouddhique chinois tombe en décadence : on reproduit sans cesse les mêmes images, on copie avec plus ou moins de bonheur les œuvres anciennes… Après les persécutions de 845, le bouddhisme déclinant en Chine, les moines-artistes ne produisent plus que des images médiocres.
En Corée, ou les premières images bouddhiques arrivent de Chine, les styles suivent d’assez près, quoique comme une école provinciale, les leçons chinoises. Les Coréens, cependant, n’accordent pas toujours leur prédilection aux mêmes sujets que les Chinois, et les imagiers paraissent plus à l’aise dans la représentation des divinités bouddhiques appartenant aux écoles ésotériques, représentations qui influenceront largement les images japonaises…