Les Dharmapàla
Les Dharmapâla (tib. Drag-ched, Chos-skyong ), défenseurs et gardiens, sont des divinités qui ont pour mission de défendre et maintenir la Loi bouddhique. Ce sont des personnages à l’aspect féroce et guerrier, qui combattent les ennemis de la Loi et chassent les mauvais esprits. Au Tibet, où ils sont principalement honorés, ils sont vénérés indivi¬duellement ou bien en groupe de huit appelé « groupe des huit terri-bles » (tib. Drag-ched) qui sont : Kâladevî (ou Shrî Devî, tib. Lha-mo), une forme féminine ; Brahmâ (Tsangs-pa) ; Beg-tse ; Yama ; Kuvera (Vaishravana) ; Hayagrîva ; Mahâkâla ; Yamântaka.
Nous avons vu que plusieurs d’entre ces « terribles » faisaient partie d’autres classifications, tels que Hayagrîva et Yamântaka. Kuvera (ou Vaishravana) faisant également partie des Lokapâla, nous le décrirons avec ce groupe. Ces Drag-ched peuvent également avoir des noms différents, et être remplacés par des formes de Vajrapâni ou de Manjushrî. Ils sont généralement représentés, au Tibet, avec une couronne de cinq crânes (peut-être symbolisant les Cinq Jina) surmontés de chintâmani entourés de flammes, ont les cheveux hérissés, les sourcils froncés. Ils portent un collier de crânes et sont vêtus de peaux de bêtes (éléphant ou tigre) ou d’une dépouille humaine. Ils piétinent sauvagement des animaux ou des êtres humains. La plupart d’entre eux sont montrés en Yab-yum avec leur Shakti ou parèdre. Les prêtres et danseurs tibétains ou Bla-ma (lamas) portent, lorsqu’ils font des cérémonies en l’honneur de ces terribles divinités, des coiffures (tib. chod-pan) composées de cinq feuilles portant les effigies des Cinq Jina en embrassement avec leur Shakti.
Signalons qu’il existe au Japon une série de « huit divinités gardiennes » composée de Dainichi Nyorai, Fugen Bosatsu, Monjû Bosatsu, Senju Kannon, Seishi Bosatsu, Fudô Myô-ô, Kokûzô Bosatsu et le Kami Hachiman-daijin, qui furent, à partir du XVIe siècle, représentées sur des « médailles » en forme de pièces de monnaies (rondes avec un trou central carré), portant à l’avers l’effigie de ces divinités et au revers quatre caractères sino-japonais les désignant. Ces médailles furent émises par des temples à l’occasion d’une inauguration, du début d’un pèlerinage ou encore pour commémorer un anniversaire.
Kaladevi (tib. Lha-mo, Dpal-ldan Lha-mo ; mongol Ükin-tegri)
Cette divinité terrible est la seule forme féminine du groupe des Drag- ched. Elle fut créée et armée par les autres divinités (hindoues et bouddhiques) afin de défendre le tantrisme.
Selon A. Getty , Brahmâ lui donna un éventail de plumes de paon, Hevajra des dés avec lesquels elle joue la vie des humains, Vishnu lui fit cadeau de deux « objets lumineux », Kuvera d’un lion, Nanda d’un roi-serpent (Nâgarâja) en guise de boucle d’oreille, Vajrapâni lui offrit un marteau, d’autres dieux une mule revêtue d’une peau de Yaksha ou de démon, et dont les rênes sont constituées par des serpents venimeux.
Elle possède un troisième œil sur le front, et est souvent assise en amazone sur sa mule. Elle porte les insignes distinctifs des Dhar- mapâla, la couronne et le collier de crânes. Selon une légende, la peau qui recouvre la mule qu’elle monte serait celle de son fils dont elle dévora la chair… Elle aurait été elle-même l’épouse d’un roi des Yaksha de Ceylan.
On la voit souvent en compagnie de deux acolytes féminins, les Dâkinî Makaravaktrâ (bleue, à tête d’éléphant ou de dauphin, qui conduit la mule par la bride) et Simhavaktrâ (rouge, avec une tête de lion, et qui suit derrière, tenant en main un couperet et une calotte crânienne). Ce groupe marche sur un lac de sang. En peinture Lha-mo est parfois accompagnée de quatre divinités féroces symbolisant les saisons :
- bleue (printemps), sur une mule jaune ;
- rouge (été), sur un yak bleu ;
- jaune (automne), sur un daim ;
- bleue, sur un chameau.
Ces quatre divinités accompagnatrices sont armées de glaives, de haches, de marteaux et de couteaux, et tiennent dans l’autre main une calotte crânienne. Bien que l’on sache peu de chose de cette terrible et sanguinaire divinité, qui fut très vénérée et assez souvent représentée, elle semble avoir été considérée comme la parèdre de Yama, le dieu des morts. Elle aurait été la déesse protectrice du Dalai-lama de Lhasa, et celle du monastère du Tashi-lhun-po. Elle est parfois appelée Châ- mundî.
Brahamâ (tib. Tsangs-pa Dkar-po ; chin. Fan Wang ; mongol Esrüa)
Cette divinité est une adaptation du dieu hindou Brahmâ, bien qu’elle n’ait aucune de ses caractéristiques ni de ses attributs dans les représentations tibétaines. Lorsque Brahmâ est représenté (rarement) sous sa forme indienne, il a comme celle-ci quatre têtes, mais tient une roue de la Loi dans la main droite. Mais en tant que Dharmapâla faisant partie du groupe des huit Drag-ched, il n’est pas, contrairement à ceux- ci, représenté avec un aspect féroce, mais plutôt comme un guerrier brandissant un glaive et portant une bannière. Il porte un turban sous sa couronne (parfois avec une conque marine) et est vêtu d’une robe flottante avec de longues manches. Il chevauche un cheval ou bien, dans certains cas, un bélier.
Beg-Tse (Lcam-Sring ; mongol Egechi Degüü)
Ce guerrier redoutable, en armure et portant des bottes mongoles, apparut tardivement et fut assez peu représenté. Selon une légende, il aurait attaqué le Dalai-lama à la tête d’une armée d’animaux, combattant pour les troupes mongoles (XVIIe siècle). Le Dalai-lama ayant pris l’aspect d’Avalokiteshvara, Beg-tse se serait soumis et converti au bouddhisme. Il est représenté avec tous les attributs des Dharmapâla, brandissant un glaive de la main droite et parfois tenant un cœur humain entre le pouce et l’index de la main gauche (ou bien une arme). Il est en position dynamique vers la droite et piétine un cheval et un cadavre humain. Il est parfois accompagné par deux petits acolytes, une femme nue assise sur un lion (symbole de la nation tibétaine) et un guerrier assis sur un loup (symbole de la nation mongole). Cette divinité terrible symboliserait la conversion des Mongols au lamaïsme.
Yama (jap. Enma-ô ; chin. Yanluo Wang ; tib. Chos-rgyal, Gshin-rje ; mongol Erlig Khân)
C’est le roi des morts, « Celui qui entrave » les humains, qui préside aux enfers. Ce serait aussi, selon certaines légendes indiennes, le premier homme. Alors qu’en Chine il n’est que le cinquième roi des enfers , il fut considéré au Tibet comme un Dhar-mapâla. Il est souvent accompagné de sa sœur Yamî, et de sa parèdre Châmundî (ou Lha-mo). Il est représenté nu, orné de colliers de crânes, de couleur bleu foncé, rouge, blanche ou jaune suivant ses aspects, avec une tête de buffle et en position dynamique sur ce même animal. Mais il peut également être représenté sous une forme humaine, avec une tête et six bras dont deux sont réunis en Anjali-mudrâ au-dessus de sa tête ; une roue est dessinée sur sa poitrine. Cependant au Tibet, où ses images sont nombreuses, il assume généralement l’un des trois aspects suivants :
- Gsang-sgrub. Il est rouge, a une tête de buffle et les attributs d’un Dharmapâla. Il se tient debout sur un buffle (parfois courant) et tient un couperet (gri-gug) et une calotte crânienne. Parfois, il porte un chin-tâmani à la place du couperet, et est accompagné par deux squelettes (chitipati).
- Phyi-sgrub, « ministre de l’Extérieur ». C’est le protecteur de la secte des « Bonnets jaunes » (Dge-lûgs-pa). Il est bleu foncé et ressemble à Gsang-sgrub lorsqu’il est accompagné de Yamî, sinon il est blanc ou jaune. Il n’est jamais représenté avec sa Shakti.
- Snag-sgrub, «ministre de l’intérieur». C’est un Juge de l’enfer, tenant à la main un couperet et une calotte crânienne. En peinture, il est bleu sombre et piétine un homme. Ses assistants piétinent des buffles.
Mahâkâla (jap. Daikoku ; chin. Dahei Wang ; tib. Mgon-po ; mongol Yeke gara)
Cette divinité, «le Grand Noir», est particulière au Tibet et fut acceptée au XVII siècle comme divinité tutélaire de Mongolie, sous l’influence tibétaine. Son nom chinois n’est que la transcription du nom sanskrit, et il n’a jamais fait l’objet d’un culte en Chine même. Au Japon, où son image semble provenir de Mongolie, il n’a pas le même symbolisme et, sous le nom de Daikoku, fut vénéré, à partir du XVIIe siècle, come une divinité du bonheur (nous verrons ce groupe plus loin). Au Tibet, Mahâkâla est à la fois un Dharmapâla et un dieu protecteur (Yi-dam). Ses attributions sont mal définies, en dehors de celle qui consiste à défendre la Loi bouddhique. Il peut prendre de très nombreuses formes, et celles-ci, selon A. Getty , peuvent se grouper sous cinq aspects et noms :
- Mgon-dkar, protecteur des Mongols, est considéré comme une divinité de la richesse. Il a une tête (parfois de buffle) et six bras. Il a les attributs d’un Dharmapâla mais tient un chintâmani et une coupe crânienne contre la poitrine, les autres bras étant diversement armés. Vêtu d’une peau d’éléphant et d’une écharpe céleste, il piétine deux éléphants. Il est de couleur blanche.
- Mgon-po est semblable à Mgon-dkar mais tient un couperet au lieu d’un chintâmani contre la poitrine. Il piétine le démon Vinâyaka. Il est bleu-noir. Il prit un aspect particulier (appelé Mgon-po Bram-zei) lors de son apparition à Phags-pa (au XIIIe siècle) : il a alors une seule tête avec une longue barbe. Son attribut distinctif est une trompette faite dans un os humain.
- Comme protecteur de la Science, il est représenté assis sur un personnage et tient un trident. Il est bleu foncé.
- Comme protecteur de la Tente (aspect mongol), il piétine un personnage et tient un couperet, une corde et un bâton.
Les significations de ces attributs ne sont guère certaines et peuvent varier selon les interprétations. De nombreuses légendes tibétaines et mongoles sont associées à Mahâkâla, qui tendent à expliquer ses divers aspects.
Au Japon, Mahâkâla est appelé Daikoku-ten (ou Makiakara-ten) et présente deux aspects bien distincts. Il n’est pas bien certain que l’aspect populaire, bénin et bienfaiteur, dérive de l’autre ni même soit en relation avec le personnage tibétain. En fait, le Daikoku-ten qui est couramment vénéré et prié au Japon paraît bien plutôt être la « boud- dhisation » d’un Kami du terroir (lequel pourrait, selon certains, être Okuni-nushi no Mikoto, Kami shintô de l’agriculture ou du « grand pays »).
Il est, au Japon, rarement représenté sous sa forme originale tibétaine ou népalaise, sauf peut-être sur quelques mandala où il figure avec trois têtes et six bras dont deux tirent au-dessus de sa tête le voile de la nuit Ses cheveux sont hérissés et il a une apparence à la fois horrible et furieuse. Dans ses autres mains droites il tient une tête de démon par les cheveux, un glaive ou un crochet, et dans ses autres mains gauches la dépouille d’une gazelle (aspect de Shiva) et un glaive.
Son aspect populaire semble appartenir plus au shintô qu’au bouddhisme. Daikoku-ten est alors essentiellement un des sept dieux du bonheur (Shichifukujin). Cependant on trouve son effigie dans les cuisines des monastères bouddhiques, où il est chargé de pourvoir à la nourriture des religieux. Il est presque certain, toutefois, que cet usage est un emprunt fait par les moines à la religion populaire. On le croit aussi « protecteur des trois trésors du bouddhisme » (le Bouddha, le Dharma et le Samgha), et il est vénéré par les travailleurs comme le « sauveur du genre humain », on ne sait trop pourquoi. On lui connaît plusieurs formes que l’on peut éventuellement classer en deux catégories : celles qui sont en rapport avec le bouddhisme et celles qui ne sont que l’expression d’une croyance populaire.
Formes en relation avec le bouddhisme
On le représente parfois avec trois têtes : la sienne plus celles de Vai- shravana et de Sarasvatî (cette dernière parfois remplacée par celle de Mârîchî). Cette forme, appelée Sanmen Daikoku (Daikoku à trois têtes), est montée sur un sanglier. On attribuait autrefois au Japon d’autres formes à Daikoku-ten. Selon le Butsuzô-zu-i (ouvrage de description des divinités japonaises du bouddhisme, publié en 1783), il y aurait eu six formes de Daikoku-ten appelées Roku-daikoku-ten.
Formes populaires
On représente généralement Daikoku-ten comme un homme assez gras (signe de prospérité) et souriant, avec un gros sac sur l’épaule (ce qui fut peut-être confondu avec le voile de la nuit tiré par Mahâkâla) ou bien posé à côté de lui et que des rats grignotent. Assis (ou debout) sur des balles de riz, il a un air affable, porte un chapeau de paysan japonais et tient les mains sur les hanches. Les lobes de ses oreilles sont enflés mais non percés. Il porte souvent dans la main droite un maillet en bois de forme particulière, appelée uchick no kozuchi, qu’il secoue pour obtenir des richesses en abondance. Son gros sac est réputé contenir la sagesse et la patience, vertus très appréciées du peuple japonais. Son effigie, toujours très vénérée, est souvent portée comme talisman. En tant que dieu de la prospérité faisant partie des sept divinités du bonheur, on lui attribue la vertu de Fortune. Son image, sous le nom de Kôjin-sama, est devenue celle du Kami shintô de la cuisine, car dans l’esprit populaire Kôjin est identique à Daikoku-ten. C’est ainsi que les images de Daikoku-ten placées dans les cuisines furent appelées Kôjin, et inversement.
Les sept divinités du bonheur (Shichifukujin)
Ce groupe de divinités populaires du Japon sont, en dehors de Daiko¬ku-ten (Mahâkâla) : Ebisu, Benzai-ten (ou Benten, Sarasvatî), Bisha- mon-ten (Vaishravana), Fukurokuju, Jurôjin et Hotei. Parmi ces sept divinités, nous avons traité par ailleurs Benzai-ten, Bishamon-ten et Hotei. Ce nombre de sept n’est pas sans rappeler celui des « sept sages du bosquet de bambous » ou des « sept sages de la coupe de vin » dont les images sont populaires en Chine. En effet, ce groupe hétéroclite formé de divinités appartenant au bouddhisme, au terroir japonais et au taoïsme chinois aurait été artificiellement créé au XVII siècle par le moine Tenkai (mort en 1643, nom posthume Jigen Daishi), désireux de symboliser pour le Shôgun Tokugawa Iemitsu (1623-1650) les vertus essentielles de l’homme de son temps : longévité, fortune, popularité, candeur, amabilité, dignité et magnanimité. Bien que ces divinités, prises individuellement, aient eu une existence antérieure à la formation de ce groupe, venant soit du panthéon bouddhique (Benzai-ten, Dai- koku-ten, Bishamon-ten, Hotei), soit des croyances du shintô (Ebisu, Daikoku, Benten) ou du folklore chinois (Fukurokuju, Jurôjin, peut- être aussi Hotei), on ne les trouve réunies pour la première fois que sous le pinceau d’un peintre de la famille Kanô (peut-être Kanô Tan’yû). Ces sept divinités sont censées voyager de concert sur le « bateau des trésors » (Takara-bune), lequel est abondamment représenté dans le folklore japonais par des images et des jouets. Ces Shichifukujin sont en effet extrêmement populaires, même de nos jours, et l’on rencontre leurs effigies (en groupe ou séparées) dans la plupart des maisons et échoppes du Japon.
Ebisu
Divinité probablement autochtone, Ebisu serait en réalité une personnification du Kami Kotoshiro-nushi no Mikoto, fils d’Ôkuni-nushi no Mikoto (donc fils de Daikoku-ten), un héros mythique du shintô. Selon certains, il pourrait également être identifié au Kami Hiruko no Mikoto, le troisième fils d’Izanami et Izanagi, les géniteurs primordiaux des îles du Japon. A ce titre il est souvent considéré comme l’ancêtre des populations primitives du Japon, autrefois appelées Ebisu. Dans certaines parties du Japon, surtout à Kyûshû, la divinité des fermes se nomme également Ebisu, et quelques groupes de chasseurs de cette île appellent les singes du même nom. Mais plus peut-être que les fermiers, ce sont les pêcheurs japonais qui ont pris l’habitude d’invoquer Ebisu avant de prendre la mer ou de plonger : ils le symbolisent par une grosse pierre qu’un jeune garçon doit aller retirer du fond de la mer à certaines époques de l’année. De nombreuses légendes et coutumes populaires ont Ebisu pour personnage central. On lui rend un culte fervent dans la région d’Ôsaka où il est fêté chaque année les 9 et 10 janvier par les marchands qui, munis de maillets, vont frapper les murs de son sanctuaire pour l’appeler, car on le croit sourd. On lui offre en hommage de gros radis (daikon) macérés dans le vinaigre (bettara). On le fête également le 20 octobre. Des sanctuaires lui sont dédiés dans tout le Japon : celui de Nishi no Miya est célèbre et attire chaque année de nombreux pèlerins. On représente Ebisu vêtu d’un ancien costume de paysan japonais, et souriant largement. Il tient dans la main droite une canne à pêche et dans la main gauche une daurade (tai ), poisson symbolique du bonheur au Japon. Ebisu est également considéré comme le patron des travailleurs, de la richesse et de la prospérité. On lui attribue la vertu de candeur.
Fukurokuju
Cette semi-divinité d’origine chinoise est peut-être la divinisation d’un sage ermite taoïste de l’époque des Song. On le dit également dieu de l’Etoile du Sud, de la sagesse, de la virilité, de la fécondité et de la longévité. On lui attribue la vertu de popularité. Il fut parfois, mais rarement, remplacé au sein de l’assemblée des sept divinités du bonheur par Kichijô-ten. Fukurokuju est généralement représenté sous les traits d’un petit vieillard barbu et moustachu, pourvu d’un crâne chauve haut comme trois fois son corps. Ce crâne démesuré prend parfois des aspects phalliques et est alors recouvert par un bonnet en tissu. Il porte un long bâton noueux auquel est attaché un livre. Sur les peintures il est souvent représenté en compagnie d’une grue, symbole taoïque de longévité. En sculpture, il tient généralement les mains cachées dans ses larges manches. On le confond parfois avec Jurôjin. Il n’est pratiquement jamais invoqué en tant que divinité isolée, et on ne lui rend aucun culte officiel.
Jurôjin
C’est le dieu du bonheur et de la longévité. Il a fort probablement la même origine que son compère Fukurokuju avec lequel on le confond souvent. Réputé grand amateur de sake (vin de riz), on le représente comme un petit vieillard avec un grand front (moins haut cependant que celui de Fukurokuju) et tenant à la main un bâton noueux auquel est attaché le Livre du Savoir. Il est accompagné par une grue (jap. tsurü), un daim noir ou une tortue. On le nomme parfois Rôjinseishi lorsqu’il est identifié avec le sage chinois Laozi.
Hotei
C’est l’un des personnages bouddhiques les plus connus en Europe où il est appelé Poussah (déformation probable du chinois Budai ou Pusa, Bodhisattva). Il s’agit peut-être aussi de l’ermite chinois Budaishi (mort en 917), qui passait pour être une incarnation de Maitreya (jap. Miroku Bosatsu). On vénère en effet ce dernier dans certains monastères zen de la secte Ôbaku (comme au Manpuku-ji à Kyôtô) sous le nom de Hotei, le « Miroku au gros ventre ». On lui attribue, parmi les Shichifukujin, la vertu de magnanimité. Il est représenté comme un moine bouddhiste chauve, mal rasé, souriant, avec un ventre énorme. Il tient un éventail non pliant (jap. uchiwa) dans la main droite et s’appuie sur un gros sac qui contiendrait des trésors sans fin, sorte de corne d’abondance pour ses fidèles. On le confond aussi parfois avec Warai-Hotoke (Bouddha souriant) ou avec Fûdaishi-ten (japonisation du nom de l’ermite chinois Budaishi) lorsqu’il est commis à la garde des bibliothèques des monastères. Il est alors accompagné par ses deux « fils ».
L’image de Hotei est souvent réalisée en jouet, à traîner ou en jouet basculant. Lorsqu’il est pourvu de roulettes, ce jouet est alors appelé kuruma-sô, le « moine roulant ». Dans certaines de ses représentations, Hotei a un œil dessiné sur le dos, symbole de sa vision universelle.
Nous avons étudié par ailleurs les représentations de Benzai-ten (Sarasvatî) et Bishamon-ten (Vaishravana).