Les vieux-catholiques
L’origine du mouvement des vieux-catholiques remonte au jansénisme qui troubla par sa doctrine pessimiste le catholicisme des XVI et XVII siècles.
L’élection d’un évêque contre l’accord de Rome en 1723 puis le refus du dogme de l’immaculée Conception en 1854 préparèrent une rupture qui fut définitivement consommée en 1870 par le rejet du dogme de l’infaillibilité pontificale. Il se constitua ainsi à Utrecht, aux Pays-Bas, une Eglise indépendante autour de laquelle se regroupèrent d’autres dissidents divers.
L’union de l’Eglise des vieux-catholiques fut scellée en 1899 par l’adhésion d’Eglises d’Allemagne, de Suisse, de Pologne, de Croatie et de Tchécoslovaquie ainsi que de groupes gallicans.
Les vieux-catholiques sont aujourd’hui présents dans une vingtaine de pays et comptent près de 500 000 fidèles répartis en 600 paroisses. Ils ont 13 évêques, un par Eglise nationale, et leur « primat d’honneur » est l’archevêque d’Utrecht. Les évêques vieux- catholiques prouvent leur légitimité par la chaîne ininterrompue de consécrations depuis leurs débuts ; pour Rome, le rejet de certains dogmes en fait des hérétiques. Par la doctrine, les vieux- catholiques sont très proches des anglicans avec lesquels ils pratiquent l’intercommunion, c’est-à-dire que les fidèles de chaque Eglise peuvent valablement communier lors des messes de l’autre. Les vieux-catholiques entretiennent également des relations étroites avec les orthodoxes et certains luthériens. Ils sont membres du Conseil œcuménique des Eglises. Sur le plan religieux, ils reconnaissent les sept sacrements, tout en soulignant l’importance particulière du baptême et de l’eucharistie. La communion se pratique sous les deux espèces, pain et vin. Le mariage des prêtres et des évêques est admis ; les évêques sont élus par les prêtres. Les vieux-catholiques ont parfois d’autres appellations : en Suisse, ils constituent l’Eglise chrétienne catholique. Quelques petites Eglises très minoritaires se rattachent à leur mouvance comme l’Eglise catholique libérale de Londres (Holy Spirit Church).
Les témoins de Jéhovah
Les témoins de Jéhovah constituent un mouvement religieux e pleine expansion caractérisé par le zèle de ses membres appelés d’ailleurs « proclamateurs » – à répandre leur doctrine.
Le fondateur du mouvement, Charles Taze Russel, est un Américain né en 1852, mort en 1916, de famille presbytérienne, c’est- à-dire protestante de tendance calviniste. Préoccupé par les questions religieuses, il s’éloigna de son église originelle lorsque, dans les années 1870, il fut influencé par les adventistes. Après quelques années d’action commune, il se sépara d’eux pour fonder un périodique, La Tour de garde de Sion, destiné à faciliter la lecture de la Bible selon son interprétation.
Une trentaine de groupes d’« étudiants de la Bible » se constituèrent ainsi dans l’est des Etats-Unis au cours des années 1879-1880 et c’est de cette période que date la société d’édition des publications de Russel.
Les « Etudiants de la Bible » diffusèrent ses ouvrages avec un succès tel que le livre Le Divin Plan des âges fut vendu à six millions d’exemplaires en quarante ans.
La doctrine des témoins de Jéhovah
La doctrine des témoins de Jéhovah repose sur la Bible, Ancien et Nouveau Testaments. Toute la vérité y est contenue mais, si chaque verset est analysé littéralement et en détail, cela n’exclut pas d’en faire une interprétation particulière.
Les témoins de Jéhovah ont une conception très tranchée du monde : l’Histoire est le champ clos de la lutte entre les forces de Dieu et celles du diable. Les gouvernements des Etats et les Eglises sont dominés par le Mal, par Satan. Il en est ainsi depuis la désobéissance d’Adam. La création d’Adam marque ainsi la fin de la création du monde terrestre par Dieu qui, selon la Bible, s’est en quelque sorte mis au repos, permettant à Satan d’étendre son influence sur la terre. Les efforts du Christ de rétablir le règne de
Dieu, Jéhovah, n’ont pas encore connu le succès, car Dieu laisse à Satan le temps de manifester toute sa fourberie.
Les Eglises ont failli à leur mission et Jésus a suscité les témoins de Jéhovah pour préparer l ‘arrivée de son règne qui c onstituera la dernière période du monde.
Pour les témoins de Jéhovah, comme pour les adventistes, la création du monde en six jours est à prendre de façon littérale mais, comme il est dit dans la deuxième épître de saint Pierre que, pour Dieu, un jour est équivalent à mille ans, 011 a déduit que la création du monde avait demandé 6 000 ans. En fait, ce temps apparaît un peu court et l’interprétation la plus récente penche pour une durée de la «journée » de 7 000 ans.
Cependant la fin du «jour » de repos de Dieu s’approche et II va bientôt intervenir à nouveau : au cours d’une gigantesque bataille, appelée bataille d’Harmaguédon, Il triomphera définitivement de Satan. Il s’instaurera alors une période de 1 000 ans pendant laquelle Jésus exercera du haut des cieux son règne sur la terre. Les morts ressusciteront et ils pourront profiter de ce laps de temps pour devenir parfaits. Cet afflux de ressuscités sur notre terre posera des problèmes d’intendance compliqués et l’on pense que cette résurrection sera progressive pour permettre l’aménagement du territoire
C’est à la fin de ce règne de 1 000 ans qu’interviendra le Jugement dernier : ceux qui auront montré leur amour et leur fidélité au Dieu créateur, Jéhovah, se verront offrir la rie éternelle sur terre, redevenue un paradis. Satan, relâché pour peu de temps avant le Jugement, sera, ainsi que ses démons, voué à la destruction.
Selon les croyances des témoins de Jéhovah, Jésus est bien le fils de Dieu mais il est inférieur à son père Jéhovah ; ainsi il n’existe pas de Trinité car, comme le pensent certains musulmans, elle paraît contradictoire avec l’unicité de Dieu.
Une autre croyance qui se rattache également aux précepte énoncés dans la Bible est que le sang est le siège de l’âme. H j résulte une série d’interdictions : on ne peut répandre le sang le transfuser ni même consommer du sang d’animal sous quelque forme que ce soit, comme par exemple du boudin. Il n’y a cependant aucune objection à se faire soigner, même par perfusion : c’est le sang seul qui est en cause mais ni le sérum, ni a fortiori les médicaments chimiques.
Le principe évangélique « tu ne tueras point » conduit à refuser tout engagement militaire, d’autant que les États sont l’œuvre de Satan. Les témoins de Jéhovah sont donc généralement objecteurs de conscience et refusent de saluer le drapeau, perçu comme une idole.
L’organisation des témoins de Jéhovah
L’organisadon du mouvement est d’une remarquable efficacité : elle combine avec souplesse, centralisation et esprit d’initiative.
Le quartier général des témoins de Jéhovah est une bâtisse cubique sans caractère située dans le quartier de Brooklyn, près de l’autoroute qui relie Manhattan à l’aéroport Kennedy de New York. Elle est surtout le siège d’une maison d’édition dont les publications assurent l’unité du mouvement. Les plus répandues sont les bimensuels Réveillez-vous, traduit en 54 langues et tiré à près de 9 millions d’exemplaires et La Tour de garde, traduit en plus de 100 langues avec plus de 10 millions d’exemplaires.
L’organisation locale du mouvement est très souple. Les « procla-mateurs » sont groupés en congrégations autonomes qui comptent chacunes quelques dizaines de membres. Dès que le nombre de membres dépasse la centaine, la congrégation se scinde et essaime. Chaque congrégation s’organise sans hiérarchie ni clergé, en fonction de la disponibilité et des capacités de ses membres.
Comme beaucoup de chrétiens, protestants et orthodoxes, les témoins de Jéhovah pratiquent le baptême par immersion totale. Celui-ci peut être administré par n’importe quel membre masculin de la communauté.
Ce qui est frappant dans les prédications des témoins de Jéhovah, c’est leur constante référence à la Bible pour justifier et expliquer chacune de leurs croyances. Cela représente un effort d’érudition et de mémoire colossal demandé à chaque témoin et cela contribue à impressionner les gens démarchés par les proclamateurs. Cette profusion de références bibliques est un élément essentiel de l’arsenal déployé pour convaincre l’interlocuteur, rapidement submerge par la constatation de son ignorance. Totalement orientés vers la prédication, les témoins de Jéhovah reçoivent une formation
profondie. Documentation et méthodes abondent pour savoir parler en public, diriger des réunions, établir le contact, répondre
à des objections, etc.
Les résultats de la prédication font l’objet de rapports périodiques de chaque proclamateur à sa congrégation, de chaque congrégation au siège national du mouvement et de celui-ci au quartier général de Brooklyn. Aussi, non seulement les statistiques du mouvement sont excellentes mais ne sont comptés comme témoins de Jéhovah que des membres actifs, ce qui n’est évidemment pas le cas des r’ chiffres très grossièrement estimés que l’on peut obtenir pour la plupart des autres religions.
L’effort de démarchage est intelligemment adapté à chaque situation. On commence par un court entretien destiné à repérer les personnes intéressées puis, au cours d’une seconde visite, la conversation se prolonge et s’appuie sur la Bible et la littérature du mouvement. La revue Réveillez-vous traite de divers sujets généraux qui tendent habituellement à montrer les malheurs du monde, indices de sa prochaine destruction. On publie aussi de nombreux témoignages de convertis où s’exprime la joie d’être enfin libéré de l’immoralité. La Tour de garde traite surtout de sujets bibliques et de l’usage que l’on peut en faire dans la vie courante.
Les personnes intéressées par la prédication sont conviées à des réunions de la congrégation locale où l’accueil est toujours particulièrement chaleureux. Le caractère agressif envers les autres croyances qu’avait parfois jadis la prédication des témoins de Jéhovah a disparu et cet effort de propagande soutenu et habile porte beaucoup de fruits, comme en témoigne le tableau ci-joint sur la progression du mouvement.
Cependant, on constate que les témoins de Jéhovah réussissent de façon très variable selon l’univers culturel auquel ils s’adressent.
Très anglo-saxons par le mode de pensée et l’organisation, les témoins de Jéhovah s’adaptent bien à un public qui a reçu une teinture d’éducation religieuse mais qui est resté sur sa faim spirituelle pour des raisons diverses : déracinement, apathie, manque de chaleur ou traditionalisme de l’Eglise originelle d’appartenance, par exemple.
En pays musulmans au contraire, où la cohésion entre milieu social et religion est très forte, les résultats sont dérisoires.
En Afrique, on a assisté à des déviations locales de la doctrine donnant naissance à des sectes qui n’ont plus grand-chose à voir avec le mouvement.
D’une façon plus générale, les Eglises originellement le moins conformistes s’unifient de façon pragmatique autour d’un « prote tantisme commun » ; il existe ainsi des séminaires interconfessionnels où les professeurs comme les élèves représentent tout l’éventail protestant.
Mais cette tendance au regroupement laisse cependant intactes deux tendances bien marquées et apparemment difficiles à concilier :
-Le Nord et l’Ouest des Etats-Unis sont nettement « libéraux » : on v adopte volontiers une interprétation symbolique des Ecritures.
-Le Sud est souvent « fondamentaliste », prenant les textes à la lettre mais il accorde, par une sorte de compensation à ce rigorisme, un grand prix à l’expérience mystique individuelle. Des exemples de cette tendance se rencontrent dans les multiples Eglises baptistes du Sud aussi bien que dans l’enseignement du pasteur évangéliste Billy Graham, « citoyen du monde », ou des nombreuses autres vedettes du culte télévisé.
Les positions de ces deux tendances à l’égard de l’œcuménisme, c’est- à-dire du rapprochement des Eglises, y compris l’Eglise catholique, sont rigoureusement opposées. Les premiers, les libéraux, en sont fermement partisans tandis que les fondamentalistes, sûrs de détenir totalement la vérité dans la lettre de l’Ecriture, y sont farouchement hostiles.
Dans le Tiers-Monde, les jeunes Eglises deviennent autonomes et les mis¬sionnaires cèdent la place à des pasteurs autochtones. D’autre part, la vigueur démographique de ces pays est telle qu’il y a aujourd’hui plus du double de protestants en Amérique (270 millions) qu’il y en a en Afrique (140 millions), tandis qu’on en trouve déjà 33 millions en Asie. L’environnement religieux, musulman, bouddhiste ou hindouiste, conduit ces Eglises à resserrer leurs rangs et à relativiser quelque peu leurs divisions doctrinales. En Inde en particulier, on tend à un christianisme où l’Eglise est l’union volontaire des croyants, selon la conception protestante, mais où elle est aussi le corps mystique du Christ, selon la conception catholique et anglicane, ainsi que la communauté où parle le Saint-Esprit, selon la conception des mouvements piétistes. Pour organiser cette Eglise très dynamique, l’Inde a adopté une structure hiérarchique de type anglican avec des évêques consacrés mais, en ce qui concerne la doctrine, chacun est libre de pencher vers la confession de son choix.
Cependant, parallèlement à cet effort de compréhension mutuelle des différentes Eglises protestantes du Tiers-Monde, on constate des tendances centrifuges qui s’expriment par la multiplication de mouvements religieux originaux. Certains de ceux-ci ne sont guère que des sectes sans avenir, d’autres sont des Eglises importantes et bien structurées.
L’étude de ce que nous appellerons, faute de mieux, les Eglises locales complétera la description déjà passablement touffue des différentes formes du christianisme.
Ce mouvement a lui-même donné naissance à d’autres Eglises, la Celestial Church of Christ et la Christ Apostolic Church.
On donne parfois le nom yorouba d’aladura, c’est-à-dire « priantes », à l’ensemble de ces Eglises qui ont toutes vu le jour depuis moins de 70 ans.