Le corps du Messie
Le Corps du Messie
Avec Jésus, nous avons vu, entendu, touché (comme dit saint Jean dans sa première lettre) les premiers signes du Royaume, mais nous attendons encore la réalisation définitive ; comme dit Paul, Jésus est la Tête, nous sommes le Corps. A nous désormais de travailler à faire grandir ce corps : sont invités à en faire partie tous ceux qui acceptent de vivre selon les valeurs du Royaume : la gratuité, le service, la non-violence, le pardon ; pour que l’humanité tout entière accepte de s’y joindre, il faudra encore du temps, mais, rappelons-nous, « pour Dieu, mille ans sont comme un jour ».
Quand le Christ dit à ses apôtres « Il fallait », il leur apprend justement à reconnaître sous la surface des jours et des millénaires la lente mais sûre maturation de l’humanité nouvelle qui sera un jour réunie en lui. C’est cela « l’intelligence des Ecritures ».
Et voilà la réponse chrétienne à la question que nous nous posions au début de ce livre : quelle est la différence entre les juifs et les chrétiens ? Le Messie est venu sur terre, nous savons le nommer, c’est Jésus de Nazareth ; mais son corps n’a pas fini de grandir : le Messie total, comme dit saint Augustin, est encore à venir.
Saint Paul a développé cette image d’une naissance : « La création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement » (Romains 8, 22).
Ce qu’un chrétien du xxe siècle, le Père Teilhard de Chardin traduisait : « Dès l’origine des Choses, un Avent de recueillement et de labeur a commencé… Et depuis que Jésus est né, qu’ a fini de grandir, qu’il est mort, tout a continué de se mouvoir, parce que le Christ n’a pas achevé de se former. Il n’a pas ramené à Lui les derniers plis de la Robe de chair et d’amour que lui forment ses fidèles… » (Écrits de guerre – 1916-1919.)