Les Chevaliers de Colomb (Knights of Colombus)
Cette association catholique compte près de 1 500 000 membres aux Etats-Unis, au Canada et dans les pays soumis à une forte influence américaine comme les Philippines (77 000 membres), Puerto Rico, le Guatemala, l’île de Guam, etc. Elle a été fondée en 1882 par un prêtre, Michael McGivney ; le quartier général est situé à New Haven, Connecticut, sa paroisse d’origine.
Le nom de colomb est destiné à souligner, à l’égard de la majorité protestante, que l’Amérique a été découverte par un catholique.
L’admission est réservée aux hommes, prêtres et laïcs, et comprend quatre degrés d’initiation ; les membres des deux premiers degrés se désignent sous le nom de brother (« frère »), le troisième degré donne droit au titre de knight (« chevalier ») et le quatrième à celui de sir knight.
La direction est assurée par le Supreme Knight. Le mouvement repose sur quatre principes : la charité, l’unité, la fraternité et le patriotisme.
Les activités sont empreintes du touchant esprit « boy scout » d’une certaine société américaine. On y discernerait difficilement des tendances gauchistes. Chaque « concile », structure de base regroupant une centaine de membres, se fixe des objectifs adaptés au contexte local de l’Eglise ; la famille et l’animation de la paroisse y tiennent une large place, mais aussi des campagnes contre l’avortement, la drogue et la délinquance ou bien pour l’écologie, la moralité publique et l’aide aux handicapés. L’association sollicite en outre la générosité des conciles pour la construction d’églises, la distribution de chapelets ou la création de fonds pour des œuvres diverses. Ainsi 10 millions de dollars sont versés annuellement au Vatican pour les œuvres pontificales.
Plus originale est l’espèce de sécurité sociale que l’association propose à ses membres : des assurances aux tarifs avantageux sont offertes pour des risques divers ; il est même possible d’obtenir des cautions pour des achats immobiliers.
Il est difficile de déterminer ce que l’attrait de l’association doit à ses vertus spirituelles ou à la qualité des services procurés. Apparemment, le terreau de la culture américaine semble nécessaire à la réussite de cette forme d’action catholique, c’est pourquoi nous avons cru bon d’évoquer cet exemple.
Pour finir, nous ne pourrions passer sous silence une forme d’activité où catholiques et protestants sont plus entreprenants, semble-t-il, que les orthodoxes, celle des missions.
Missions et missionnaires.
Pour les chrétiens, leur croyance est un trésor inestimable qu’ils seraient coupables de garder pour eux-mêmes. Cette « bonne nouvelle » reçue de Jesus-Christ selon laquelle Dieu réserve à tous les hommes qui veulent !en 1 accepter un destin à la mesure de son amour infini, cette bonne nouvelle doit être annoncée partout dans le monde. La simplicité de ce message ne signifie pas qu’il soit facile à faire passer. Dès qu’on tente l’,exPUquer d’où vient cette révélation et qu’on parle de Jésus-Christ, istoire de cet Homme-Dieu condamné à mort par la justice officielle miraculeusement ressuscité est propre à plonger dans la perplexité les Fonnes animées des meilleures intentions. Qu’ pourrait croire sponernent en un Dieu tout-puissant qui se place délibérément en position de serviteur jusqu’à donner sa vie dans les conditions les plus révoltantes 5 Un tel message n’est crédible que dans la mesure où ceux qui le transi mettent témoignent par leur comportement du changement total de vie qu’il implique. Il est évident qu’un chrétien tiède ne peut faire qu’un médiocre missionnaire, il n’aurait d’ailleurs nullement envie de le devenir On imagine mal aujourd’hui l’héroïsme des missionnaires de jadis, prêtres ou religieux, jésuites, pères blancs, pères du Saint-Esprit, des missions étrangères et bien d’autres encore. A peine sortis de l’adolescence, ils abandonnaient leur monde familier pour se retrouver après de longues semaines de voyage dans un environnement si hostile que nombre d’entre eux ne survivaient que quelques mois. Se faire massacrer dans des condi¬tions atroces était bien souvent le sort de ceux dont les maladies tropicales n’avaient pu venir à bout1.
Le courage des missionnaires ne peut s’expliquer par le fanatisme – quoique tous n’en aient pas été exempts – car celui-ci fait mauvais ménage avec la douceur, le respect et le sens du service requis par leur apostolat. C’est donc cette force intérieure puissante qu’ils appellent la foi qui a permis aux missionnaires de « convertir » à leurs croyances des populations entières au point que presque toute l’Afrique de la forêt et l’Océanie ont été touchées par le christianisme depuis un siècle et demi.
Mais si les missions sont un bon baromètre du dynamisme et de la vitalité de l’Eglise, on pourrait s’inquiéter des effets de la désaffection de la pratique religieuse en Occident. Un diagnostic implique de préciser la notion de mission. Il n’y a pas si longtemps, les choses étaient plus claires : un pays dans lequel l’Eglise n’était pas implantée était un pays de mission et le travail de défrichage évangélique était confié à une organisation missionnaire. Aujourd’hui, les anciens pays de mission disposent d’une Eglise structurée avec évêques et clergé local tandis que les missions sont devenues surtout un renfort apporté par les pays les mieux dotés en prêtres ou religieuses.
On mesure mieux cette évolution récente et rapide du catholicisme grâce à quelques chiffres. Au début du XIX siècle, on estime qu’il n’y avait qu’envi¬ron 300 missionnaires dans le monde. Aujourd’hui, sur un effectif de l’ordre de 1 600 000 personnes (prêtres, religieuses et laïcs) qui se consacrent tota¬lement à l’Eglise, 10 % d’entre eux, soit 160 000, travaillent pour les missions. Le nombre des missionnaires, religieuses comprises, a doublé de 1932 à 1963 ; 1/3 des prêtres hollandais, 1/4 des prêtres belges, un prêtre français sur 11 et un américain sur 17 est missionnaire. Le tarissement relatif du recrutement sacerdotal en Occident est relayé par des prêtres du Tiers- Monde. L’Eglise catholique de l’Inde, qui ne compte que 13 millions de fidèles, envoie 1 000 prêtres en mission dans divers pays d’Asie, d’Afrique à Madagascar. Les Africains eux-mêmes deviennent missionnaires ; par xeI1iple, la congrégation des Apôtres dejésus, fondée au Kenya, compte 30 ‘très, 160 étudiants et 180 novices. Ce nouveau type de missionnaires aura pas à travailler en terrain vierge comme leurs aînés. Ils seront, en revanche, bien placés pour contribuer à « l’inculturation » du catholicisme, conformément aux orientations du concile de Vatican II.
Cette question de l’adaptation du catholicisme à des cultures profondément étrangères au monde méditerranéen garde en effet une importance capitale pour l’universalité de l’Eglise1. Les échecs les plus douloureux du catholicisme dans le passé ont été provoqués le plus souvent par une incapacité à intégrer les particularismes culturels des peuples étrangers. Ainsi, au XIX siècle, la remarquable équipe de jésuites du père Ricci était sur le point de convertir l’empereur de Chine quand une coterie romaine fit tout échouer par des critiques irresponsables sur les nécessaires adaptations de rite qu’une telle opération impliquait.
Dans d’autres circonstances, le courage et la bonne volonté des missionnaires se sont malheureusement accompagnés de naïveté et d’étroitesse d’esprit : quand les Portugais découvrirent en Inde au XVe siècle une communauté chrétienne plus ancienne que la leur, ils s’évertuèrent à bouleverser ses traditions pour imposer un rite latin qui n’avait aucune justification mais fut la cause de bien d’inutiles conflits.
On oublie trop souvent en effet que l’Eglise catholique, si elle est romaine de rite latin à une écrasante majorité, comporte d’autres rites, dits orientaux, tout aussi vénérables, preuve vivante qu’il est dans la tradition la plus ancienne de l’Eglise d’être pluriculturelle.
Les églises catholiques de rite oriental Catholique ne signifie pas uniforme et l’Eglise garde trace de son origine orientale dans les rites pratiqués par certaines communautés catholiques vénérables et parfois méconnues.
Ces Eglises de rite oriental sont totalement catholiques, c’est-à-dire qu aucune nuance doctrinale ne les sépare de l’Eglise romaine. Seules la façon de célébrer le culte, la langue utilisée et des particularités relatives au clergé les différencient du catholicisme majoritaire de rite romain et es rapprochent au contraire d’Eglises chrétiennes non catholiques, orthodoxe ou monophysite.Ces Eglises peuvent se classer selon les cinq rites différents qu’elles pratiquent :
– lLe rite byzantin, commun avec l’orthodoxie, est celui des Eglises grecque- melkite, roumaine et ukrainienne, mais il est aussi suivi par une partie des catholiques tchèques, polonais, hongrois, etc. Ses plus hauts dignitaires sont le patriarche melkite d’Antioche, résidant à Damas, les patriarches melkites d’Alexandrie, en Egypte, et de Jérusalem, l’éparque melkite du Brésil et l’exarque melkite des Etats-Unis. Le rite byzantin est célébré dans diverses langues locales ; les grecs-melkites, contrairement à ce que suggère leur nom, sont de langue arabe ‘.
– Le rite arménien, proche parent du précédent, est commun aux catholiques, très minoritaires, et aux autres Arméniens de religion orthodoxe dits aussi grégoriens. Le patriarche des Arméniens catholiques réside à Beyrouth.
– Le rite syrien d’Antioche, ou syriaque occidental, est celui de plusieurs communautés catholiques : les maronites, dont le patriarche réside à Bkerké au Liban ; les syriens-catholiques, dont le patriarche est à Beyrouth et les syromalankars de l’Inde. En outre, ce rite est pratiqué par l’Eglise syrienne, dite jacobite ou orthodoxe, ainsi que par l’Eglise malabar orthodoxe de l’Inde. La langue de ces Eglises est le syriaque, c’est-à-dire l’ara- méen, la langue de Jésus-Christ, sauf pour les Malabars et les Malankars qui ont adopté la langue de l’Etat du Kerala, le malayalam.
– Le rite assyro-chaldéen ou syriaque oriental est pratiqué par les catholiques chaldéens et les catholiques malabars de l’Inde. Les premiers sont sous l’autorité du patriarche de Babylone, résidant à Baghdad, et les seconds directement sous celle du Saint-Siège de Rome. Les premiers ont le syria¬que pour langue liturgique et les seconds, le malayalam. Le rite assyro- chaldéen est également pratiqué par l’Eglise nestorienne, reste de l’hérésie de Nestorius condamnée au concile d’Ephèse en 4312.
– Le rite alexandrin est pratiqué par les nombreux chrétiens des Eglises copte et éthiopienne. Les coptes et éthiopiens catholiques, peu nom¬breux, emploient également ce rite3 ; leurs patriarches résident respecti¬vement à Alexandrie et Addis-Abeba.
Tous les rites orientaux se caractérisent par une messe en deux parties nettement distinctes, la messe des catéchumènes et la messe des fidèles4. Jadis, à la fin de la première partie, ceux qui n’étaient pas encore baptisés ittaient l’église. La messe des catéchumènes est centrée sur la lecture vangile et celle des fidèles sur la consécradon du pain et du vin et la communion. Cette distinction existe dans le rite latin mais elle est moins ne d’exemple de rite oriental, voici quelques indications sur le rite haldéen, le plus ancien de la chrétienté puisqu’il remonte au ir siècle : ¡1 existe trois types de messes, la première, appelée « sanctification des nôtres » est célébrée du Samedi saint jusqu’au premier dimanche de l’Avent ; la deuxième messe, dite de Théodore le Grand, est célébrée du emier dimanche de l’Avent jusqu’au dimanche des Rameaux ; la troisième, la messe de Nestorius, est célébrée cinq fois par an, notamment à l’Epiphanie et le Jeudi saint. La mélodie de la liturgie est d’inspiration juive et fait usage d’instrumenls cités dans la Bible. Les gestes des fidèles sont aussi empruntés au judaïsme.
Parmi les particularités des Eglises de rite oriental, la plus connue concerne l’existence de prêtres mariés, dans des conditions semblables à celles de l’Eglise orthodoxe. C’est donc une tradition latine mais non catholique d’imposer le célibat aux prêtres1.
Ce sont des raisons historiques qui expliquent non seulement l’existence mais aussi la faiblesse numérique des catholiques des différents rites orientaux. Dès le VI siècle, l’hérésie monophysite éloigne de l’Eglise la majeure partie des chrétiens coptes et éthiopiens, les catholiques ayant conservé le rite alexandrin sont donc très peu nombreux ; puis, au XI siècle, le schisme entre catholique et orthodoxes range du côté de ces derniers la plupart des chrétiens de rite byzantin et arménien. On ne peut donc avoir une vue objective de l’Eglise d’Orient qu’après avoir étudié le grand courant chrétien de l’orthodoxie.
L’orthodoxie
Ce qui sépare l’orthodoxie du catholicisme est avant tout une différence de sensibilité. Autant dire que ces deux expressions du christianisme ont tellement en commun que leurs divergences semblent bien dérisoires.
Le fossé s’est creusé à la suite d’un concours de circonstances où interviennent des rivalités purement politiques, l’incompréhension de textes réduits et surtout l’étroitesse d’esprit de hauts dignitaires des deux
Pour comprendre quels peuvent être aujourd’hui les rapports entre orthodoxie et catholicisme, il faut garder présent à l’esprit que pendant 1000 ans il n’y a eu qu’une Eglise, à la fois catholique et orthodoxe, et qu’il y aura bientôt 1 000 ans que la séparation est consommée. De telles durées modifient profondément aussi bien les mentalités que le contexte historique ; les rapports entre orthodoxie et catholicisme ne sont donc évidemment plus aujourd’hui ceux qui prévalaient au moment de la rupture.
Un retour sur le passé est cependant nécessaire pour déterminer dans quelle mesure on peut espérer voir s’effacer les séquelles de ces anciennes querelles.