L’enseignement de Bouddha
L’analyse que bouddha porte sur le monde s’exprime par ce qu’il appelle les quatre vérités :
– Tout est souffrance en ce monde : la naissance, la vieillesse, la maladie, la mort, l’union avec ce qu’on n’aime pas, la séparation de ce qu’on aime, toute forme d’attachement.
– La cause de la souffrance réside dans le désir sous toutes ses formes, y compris celui d’exister. C’est le désir qui nous enchaîne au cycle infini des réincarnations.
– La « suppression de la souffrance s’obtient par le renoncement et le détachement.
– Pour atteindre cet objectif, il faut pratiquer une morale de droiture. Cette morale s’appelle la « voie sacrée à huit embranchements » :
– nos croyances ;
– notre volonté ;
– nos paroles ;
– nos actes ;
– notre façon de vivre ;
– nos efforts ;
– notre pensée ;
– notre méditation ;
doivent témoigner d’une totale pureté et rectitude.
Le respect de ces principes conduit l’homme à se libérer de toute attache ce qui lui permet d’atteindre le « nirvana ».
Le bouddhisme n’a jamais défini en quoi consiste ce nirvana. Le mot, d’origine sanscrite, a le sens approximatif d’extinction mais la notion qu’il recouvre n’est pas précisée : on ne sait qu’il s’agit d’un anéantissement ou d’un parfait bonheur. La seule ambition du bouddhisme est d’y donner accès en observant une morale.
L’enseignement de bouddha ne cherche pas à résoudre la question de la destinée de l’homme ou de l’origine du monde. Il se veut purement « utilitaire » et ce qui est inutile pour notre salut ne l’intéresse pas.
Le bouddhisme est donc avant tout une technique destinée à maîtriser les sens et l’imagination, le corps et l’esprit : l’objectif est de prendre conscience du caractère illusoire du monde pour s’en détacher plus faci¬lement. Dans ce but, les huit préceptes de la « voie sacrée » sont eux- mêmes une technique :
– Il faut croire aux quatre vérités pour ne pas s’égarer en dehors du chemin montré par bouddha.
– Il faut maîtriser notre volonté pour éloigner tout désir des sens ou de l’esprit.
– Il faut que nos paroles participent à l’effort de détachement. On doit dire la vérité, être conciliant et éviter les bavardages inutiles.
– Il faut un comportement moral cohérent avec le détachement recherché. Le meurtre, le vol et l’adultère sont les actes prohibés le plus vigoureusement.
– Notre façon de vivre doit témoigner du même désintéressement. Le moine ne quémande pas sa nourriture, il la reçoit de ceux qui la lui offrent pour s’acquérir des mérites.
– Nos efforts doivent tendre au bien et nous détourner du mal.
– Notre pensée ne doit pas se laisser entraîner par nos impulsions ou nos désirs.
– Notre méditation est l’aboutissement et le couronnement du comportement précédent.
La méditation elle-même est une technique, connue sous le nom de yoga1 il s’agit de maîtriser son corps et sa respiration pour favoriser la concentration spirituelle, le corps étant indissociable de l’esprit. Les positions du yoga cherchent à éviter toute contraction musculaire pour mieux libérer l’esprit. Il faut toutefois souligner que la méditation bouddhiste ne consiste pas à réfléchir intensément à un quelconque problème mais à se vider l’esprit de l’inutile qui l’encombre, c’est-à-dire de toute pensée. C’est pourquoi le cadre dans lequel est pratiquée cette méditation est toujours extrêmement dépouillé : certains se placent face à un mur nu, d’autres fixent le ciel à travers un trou du plafond ou encore se concentrent sur un peu d’eau au fond d’un bol. L’efficacité de ces techniques ne prend toute sa valeur qu’au sein d’une communauté de moines qui assure un cadre à l’effort individuel. C’est pourquoi bouddha ne s’est jamais adressé à de larges couches de population mais toujours à un nombre réduit de disciples. C’est aux moines qu’est réservé l’accès au nirvana.
En matière sociale, bouddha, contrairement à une réputation généralement établie, n’a jamais condamné le système des castes, qui était celui de la société où il vivait. Il a seulement, et c’est déjà beaucoup, admis parmi les moines tous ceux qui voulaient le suivre, quelle que soit leur caste.
Vis-à-vis des femmes, le bouddhisme n’est pas très tendre, car elles sont une raison d’attachement à ce monde et, pire que tout, elles sont l’instrument du renouvellement de l’existence. Ce n’est qu’à regret que bouddha accepta qu’elles puissent devenir nonnes, mais seulement avec un statut de deuxième zone.
Quant aux laïcs, bouddha leur assigne le rôle de subvenir aux besoins des communautés de moines. Si les laïcs sont généreux, leur prochaine vie sera celle d’un moine : ils ne peuvent espérer meilleure récompense.
On voit que le bouddhisme garde du brahmanisme et de l’hindouisme la croyance en la réincarnation : après leur mort, les êtres retrouvent vie dans un autre corps, selon les mérites de leurs actes. Cependant, le bouddhisme diffère profondément de ces religions indiennes par l’absence totale de référence à un dieu quelconque : il n’y a ni culte ni dogme et bouddha lui-même n’est ni un prophète ni un sauveur. C’est un homme qui a su trouver par lui-même l’explication de la vie et la façon d’en sortir. Le bouddhisme peut ainsi apparaître comme une émanation hérétique des religions indiennes ou comme une philosophie athée. Sa doctrine pessimiste a finalement été rejetée par les Indiens, peut-être parce qu’elle ne satisfaisait pas leur vif besoin de religiosité.
En outre, il est difficile de ne pas relever quelques contradictions dans la doctrine des bouddhistes. Pour eux, le monde n’est qu’illusion et la personne n’est qu’une association passagère d’éléments destinés à se séparer. On voit mal, dans ces conditions, pourquoi nos actes ont de l’importance et en quoi ils ont une influence sur notre prochaine vie. On peut en outre se demander comment il est possible d’atteindre de son vivant le nirvana si celui-ci est un anéantissement et comment nos actions déterminent notre vie ultérieure si l’âme n’est qu’illusion.
Malgré l’absence de réponses données à ces questions peut-être trop logiques, nul ne peut contester le pouvoir de séduction de ce courant spirituel qui a su s’adapter à tant de cultures et les imprègne d’une prenante atmosphère de douceur et de respect d’autrui.