Les Hafsides de Tunis
Les Hafsides
Un chef almohade, Abu Zakariya ibn Hafs, installé à Tunis en 1229, créa une dynastie qui dura jusqu’en 1574. Les Hafsides voulurent prendre la place des Almohades, arguant du fait que leur ancêtre, Abu Hafs, tenait auprès d’Ibn Tumert une place équivalente à celle d’Abd al Moumin. C’est en ce sens qu’Al Mostancir n’hésita pas à prendre le titre califal en 1258. Le royaume connut d’abord une période de grandeur et de prospérité sous les règnes d’Abou Zakariya (1229-1249) et de son fils Al Mostancir (1249-1277). Les routes transsahariennes de l’or aboutissaient à Tunis où venaient commercer les Génois, les Pisans et les Vénitiens avec lesquels les Hafsides avaient signé des accords. Les émigrés andalous contribuèrent à l’enrichissement et à l’embellissement de Tunis. Après la mort d’Al Mostancir, l’Ifriqiya connut les épreuves habituelles : querelles dynastiques, révoltes de tribus, sécessions provinciales…, ce qui permit aux Mérinides de conquérir l’Ifriqiya, en 1347. À partir de 1370, l’État hafside se reconstitua et connut une période de stabilité et de prospérité sous les règnes d’Abu al Abbas (1370-1394), d’Abu Faris (1394-1434) et d’Othman (1435-1488). Il sombra ensuite dans l’anarchie et devint la proie des ambitions espagnoles et turques qui se disputèrent les principaux ports. Le dernier Hafside disparut en 1574, quand les Turcs se rendirent définitivement maîtres de Tunis. Les Hafsides accordèrent une grande place à l’armée, mais leur faiblesse principale, qui devait entraîner leur chute, fut de ne jamais disposer de flotte puissante. Les souverains ont laissé une réputation de justice et eurent à cœur de développer l’enseignement. La grande qualité des Hafsides fut de maintenir une politique équilibrée, très souple vis-à-vis des différents groupes sociaux de leur Etat : Berbères, Arabes Hilaliens, Juifs dont le nombre fut grossi par l’arrivée de Juifs espagnols, Chrétiens, commerçants ou membres de la garde personnelle du souverain. Tunis devint alors une grande ville enrichie par le commerce avec l’Europe ou avec le Levant.
Les Abd al Wadides de Tlemcen Yaghmorasan Un Zénète, Yaghmorasan, qui régna quarante-huit ans
(1235-1283), fonda un royaume dans le Maghreb central des environs d’Oujda à la Kabylie. Tlemcen, bien située sur la route entre le Touat (Sahara) et Honain (port situé près d’Oran), devint une cité commerciale et un centre culturel comptant cinq médersas. Mais les Abd al Wadides eurent du mal à échapper à la tutelle de leurs deux voisins et ils ne purent jamais créer un Etat solide.
Les Mérinides
Les Banu Merin étaient des nomades berbères zénètes, qui nomadisaient dans le Maroc Oriental actuel et qui, profitant du déclin almohade, s’avancèrent vers l’ouest à la recherche de riches terres. Dès 1248, ils sont maîtres de Fès, Salé…, puis ils se dirigent vers Sijilmassa, mais ils ne s’emparent de Marrakech qu’en 142 1269. L’absence de but politique et religieux explique
la lenteur de leur montée, mais ils eurent aussi du mal à soumettre le pays et à éliminer les derniers Almohades. Les Mérinides eurent ensuite deux objectifs : reprendre pied en Espagne et reconstituer l’Empire maghrébin. Ils prirent le titre semi-califal d’Amir al Muslimin. Le royaume mérinide connut son apogée sous Abul Hassan (1331-1349), qui parut sur le point de réaliser le rêve mérinide, lorsqu’il s’empara de Gibraltar, puis établit sa domination sur les royaumes abdelwadide et hafside. Cependant, ses prétentions dépassaient ses forces et il perdit tout, connaissant même l’échec suprême d’être battu par son propre fils. Celui-ci, Abu Inan (1349-1358) voulut, à son tour, réunifier le Maghreb. Comme son père, il s’empara de Tlemcen et de Tunis, mais fut battu et mourut sur un échec. Une crise générale frappa alors l’Etat mérinide. Les Portugais firent leur apparition au début du XVe siècle, tandis que le pays se fragmentait. La dynastie, en pleine décadence, fut remplacée par celle des Banu Wattas, qui eut beaucoup de mal à gouverner le Maroc, de 1471 à 1554, et signa avec les chrétiens des accords leur permettant de s’installer dans certains ports : Safi, Mazagan, Agadir …
L’économie du Maghreb
L’économie du Maghreb est encore très mal connue. De nombreux points restent obscurs et les historiens ont souvent plus travaillé à partir d’hypothèses que de sources précises.
L’agriculture nous est décrite par les voyageurs géographes qui se montrent généralement frappés par la prospérité du pays : Yaqubi, Ibn Hauqal, Al Bakri et ldrissi. Ils mentionnent les cultures céréalières (Béja, plaines atlantiques), les vignes (Cap Bon), les oliveraies (Sahel) et les vergers autour des grandes villes ; ils citent la culture du coton (Tadla) et de la canne à sucre (Ceuta et Sousse). Ils notent l’existence de plusieurs mines dans les montagnes : or, argent, plomb, zinc, cuivre et ils évoquent aussi l’artisanat : tapis, céramique, poterie, étoffes.
Le Maghreb tirait surtout sa richesse du commerce saharien. « L’Ile du Couchant » a en effet toujours été en relation avec l’Afrique Noire ; c’est l’intermédiaire entre cette dernière et l’Europe méditerranéenne. Les Maghrébins y allaient chercher l’or, l’ivoire et les esclaves, et lui apportaient le sel, des textiles et de plus en plus des objets en fer (armes…). Les routes partaient surtout de la région du coude du Niger (Gao) et se dirigeaient, soit vers le Touat où elles bifurquaient vers Sijilmassa ou vers Tlemcen, soit vers Ghadamès, d’où l’on gagnait Kairouan ou Tripoli. Nous avons vu que le contrôle des débouchés de ces routes a souvent été le mobile des guerres maghrébines. Les Arabes tenaient aussi la Méditerranée occidentale. Les pirates sarrasins, andalous ou ifriqiyens menaient, à l’époque des Aghlabides, des opérations de rapt et de pillage sur les côtes chrétiennes. Ils s’y installèrent parfois, comme à Fraxinetum, dans le golfe de Saint-Tropez, où ils restèrent de 890 à 973. On a l’impression qu’un changement intervient au XIe siècle, au moment de l’arrivée des Hilaliens au Maghreb. C’est alors que les commerçants pisans, génois, amalfitains abordent au Maghreb et que les Normands mènent à leur tour leurs expéditions de piraterie. Dans les siècles qui suivent, il semble que la baisse de la population et l’extension du nomadisme soient des phénomènes parallèles. Au XIVe siècle, le Maghreb perd le contrôle de la route de l’or et les Européens se montrent de plus en plus entreprenants.